Le Caboteur
Reportage sur la fabrication du « Caboteur »
vendu par Soclaine France
Préambule
« SOCLAINE est une PME de la région parisienne disposant de son propre bureau d’études et d’une usine de fabrication. Elle est membre depuis 1980 de la Fédération française des Industries du Jouet et ses maquettes de bateaux ont été primées à plusieurs reprises (sic). »
C’est ainsi que l’entreprise se présente sur son site Internet. Sur la grande photo couleur qui orne la boîte de construction de son caboteur, il est dit : « Pour débutant dès 8 ans. Motorisé. Possibilité radio-commande ». Il est annoncé également que les pièces sont découpées au laser. Chic ! On peut commencer immédiatement le montage !
Mais en réalité, expérience faite, le Caboteur selon Soclaine, c’est de la merde (pour parler français).
- Tel que présenté, ce modèle à 85 euros n’est pas pour un débutant.
- Le munir que d’un minuscule moteur de 3V ne veut pas dire qu’il peut être radio-commandé.
- Le manuel de montage est réduit à sa plus simple expression.
- La qualité des matières premières laisse à désirer.
- Tous les accastillages sont-ils fournis ? Oui, mais ils sont en plastic et de qualité minable.
Je ne connais pas les autres produits conçus et fabriqués par Soclaine. Mes remarques ne se rapportent qu’ à un produit et à ma première expérience avec cette marque. Contrairement à l’affirmation de Soclaine, vous comprendrez que le modèle issu de cette boîte de construction n’aurait eu aucune chance de remporter la moindre des médailles !
Pierre Bugnon a eu la gentillesse de me remettre cette boîte de construction en précisant : « Etant destinée à un débutant, il n’y a pas de chance que je construise un jour ce bateau alors, autant le donner à un débutant, à ton petit fils ». Bien que j’aie été très critique au début de ce reportage, je suis très reconnaissant du geste de Pierre à l’intention de mon petit-fils Mathys car j’ai rapidement réalisé que tel que présenté, le caboteur selon Soclaine pouvait devenir un ravissant modèle navigable et radio-commandé, à condition que le débutant soit accompagné d’un constructeur expérimenté et suffisamment argenté pour remplacer la pacotille par de la qualité et pour se procurer les accessoires que l’on ne trouve pas dans la boîte d’origine. Vous allez comprendre comment, en tandem avec Mathys et avec les conseils et les aides de membres du club AMC, nous avons su tirer un énorme profit de notre volonté de surmonter les difficultés et de construire un beau et solide bateau réellement navigable et radio-commandé.
Remarque : dans le texte, les n° entre ( ) se réfèrent aux n° des photos.
En ouvrant la boîte, l’élément-clé de tout bateau, sa quille est cassée (1). Sur une partie mince et faible de la quille, un « nœud » s’est trouvé malencontreusement placé. Cette zone de bois très dur donc rigide était parsemée de fissures et le moindre mouvement a provoqué la cassure. (3) Dès les premières membrures posées (ici la quille a été réparée), la structure apparaît légère et la qualité du CP (contreplaqué) est très moyenne. (4) L’idée de réparer la quille n’était pas la bonne. Une fois, ça va ; mais si la plaisanterie se répète, cela complique et retarde les travaux comme vous allez le constater. Mais entretemps j’avais construit une base de travail (6, 12, 16, 17) et je pensais pouvoir avancer rapidement dans la construction de cette coque qui se présentait simple et facile (selon la notice de montage !). Les trois images ci-dessus laissent voir les zones de réparation qui touchent la quille et une membrure et qui, par la suite vont encore influencer la forme des parois du fond du bateau. Mais cela, il vaut mieux l’ignorer pour le moment. Cette structure de coque, bien qu’élégante, apparaît mince et légère. Au moment du collage des pièces composant la coque, on se rendra compte que les surfaces de contact seront bien trop minces pour garantir un bon collage et par la suite une étanchéité digne… d’un bateau destiné à naviguer !
Tentative de pliage des flancs à la vapeur (19). La notice précise que pour plier du CP il suffit de le plonger un certain temps dans de l’eau bouillante. Une tentative à sec nous laisse dubitatif mais nous passons finalement aux actes (21) et l’un des flancs subit des essais de pliage après avoir passé dans l’eau bouillante. Non seulement grosse difficulté de réaliser un pliage correct mais une fois refroidie, la pièce est devenue très rigide et son ajustage dans la proue s’avère des plus risqués. Ici une fois de plus, la qualité du bois ne nous plait pas et finalement nous décidons de nous distancer des instructions et de développer nos propres idées en utilisant du CP de bonne qualité.
(23, 24, 25, 26. 27, 29) Comprenant de mieux en mieux comment les pièces constitutives de la coque allaient être collées, il nous est apparu évident de devoir élargir toutes les surfaces destinées à entrer en contact les unes avec les autres. Ce sont des longerons en bois de balsa tirés de notre stock qui ont été utilisés à cet effet ; souci de légèreté ! Ces 5 images donnent une idée… mais une idée partielle de la quantité des éléments qui allaient subir cette opération d’élargissement !
(42, 47) Un autre grand écart aux instructions de Soclaine, fut la décision de dessiner les flancs du caboteur sur du CP 4mm de bonne qualité et de procéder en deux parties puis en trois temps. Les flancs nouveaux, dans leur partie plate (de la poupe à la fin de la partie rectangulaire de la coque) seront constitués en deux parties. La pose ou le collage du CP se fera en trois temps : 1° collage du flanc plat de 4mm d’épaisseur. (39, 40, 49). 2° collage sur la proue de la partie fortement arrondie du flanc, mais en CP de 2mm d’épaisseur. Et dans un 3e temps, collage sur la partie précédente, d’une seconde pièce de CP de 2mm pour obtenir la même épaisseur partout, 4mm et la même rigidité d’un bout à l’autre du flanc. Cependant, au niveau de la jonction des flancs à la proue de la coque, on note que l’épaisseur de la partie frontale et verticale de la quille est beaucoup trop mince (51) et en plus cette pièce est légèrement voilée ! Un coup d’œil général sur la coque démontre que celle-ci manque de panache, de hardiesse ; la proue semble baisser la tête. Les flancs ne remontent pas assez. Il faudra rehausser la pointe de la proue sinon le caboteur risquera de s’enfoncer dans le creux des vagues!
(55) Au fur et à mesure de la progression des travaux se manifeste un peu partout la nécessité prudente de prévoir des zones de bon collage en élargissant toutes les arêtes des parties appelées à être collées à d’autres. Les images (56, 66, 67, 68, 69, 70, 71, 72, 75, 76, 77 et 79) illustrent la manière originale avec laquelle nous avons résolu l’ajustage et le collage des flancs et des fonds de coque au niveau de la proue. Les petits bâtonnets de balsa (66, 67) visent à assurer le parfait collage des deux pièces du fond de cale avant. Le fond de cale en CP 2mm n’est pas doublé. Le quadrillage de collage renforce suffisamment la fond qui n’est pas appelé à supporter de lourdes charges. Ces dernières reposeront sur le pont de charge, au-dessus des accus, récepteur, moteur et variateur. De plus – et cela n’est même pas conseillé par Soclaine – la coque sera enduite de durcisseur et d’une fine couche de laine de verre pour garantir sa solidité et son étanchéité.
Collage des éléments du fond de coque. Toutes les zones à coller ont été élargies (82, 83). Le dessin des panneaux de fond est rapidement tracé sur papier (84) puis reporté sur du CP 2mm et découpé (87, 88) puis marqué (babord, tribord) et enfin collé (89, 90).
Pendant le séchage des éléments ci-dessous, nous nous occupons du montage de la cabine de pilotage. Première surprise, le toit de la cabine a été découpé dans un panneau qui avait subi un rapiéçage à sa fabrication. La pièce était bicolore ce qui ne nuit en rien, mais elle était courbée au niveau du rapiéçage (95). Nous avons perdu du temps à essayer de la redresser en la passant à la vapeur mais cela ne servit à rien. La déformation subsista et la pièce finit à la poubelle. Un minimum de contrôle de qualité lors de l’impression des pièces sur le CP d’usine, puis un second contrôle après marquage de la découpe au laser auraient dû permettre l’élimination de la pièce malpropre avant sa mise en boîte, avant « que les bateaux Soclaine ne soient primés à plusieurs reprises ». Un autre point faible est apparu lors de la préparation des fines pièces du vitrage de la cabine. Ici aussi et encore : CP de mauvaise qualité ; un conseil, dans les instructions aurait été d’avertir le débutant de la meilleure manière de dégager les ouvertures des fenêtres sans provoquer des bavures dans leur entourage (96, 99). Le montage de la cabine, avec un toit tiré de notre stock de CP 3mm de bonne qualité n’a posé aucun problème (106, 108). La préparation des petites pièces à la pose d’une couche de fond c’est de la routine mais le vernissage, si possible en une seule opération de la cabine déjà collée (110) nous donne une idée : si nous construisions une petite cabine de vernissage, histoire de ne pas polluer ni de salir aux alentours ? Mais avant nous ne résistons pas à voir, à « juger » de la future allure du bateau et force est de constater que le tout, pour l’instant, ressemble assez valablement à un caboteur (100, 101). Pour y parvenir, nous avions préparé et collé les pièces de la grosse cheminée (102, 105, 106, 108).
Cela dit, nous revenons à notre idée d’une cabine de vernissage (111, 112, 113). Une boîte de 40 x 30 x 30cm fut rapidement construite. Ouverte sur un seul côté, sa partie arrière est fermée d’une simple feuille de plastic rabattue, qui peut se placer d’un côté comme de l’autre de la « boîte ». Dans les angles, des rangées de crochets permettent de passer des fils dans tous les sens. Une fois correctement suspendue, une pièce en 3 dimensions peut être vernie au spray, en une ou plusieurs couches, sans qu’il soit nécessaire de la toucher. N’essayez pas d’imiter cette cabine de vernissage ; elle fut rapidement brevetée dans tous les pays de la Planète et elle nous a déjà rapporté des milliards (veuillez ne pas ébruiter la chose).
Lors des premiers tests (112), nous avions protégé l’angle de la buanderie par un vaste rideau de plastic mais cette mesure s’est révélée non indispensable. La petite cabine brevetée suffit !
Rebelotte avec une pièce voilée (116, 117), comportant un nœud et traduisant, une fois de plus, un manque flagrant de contrôle de qualité aux différents stades de production chez Soclaine. La « qualité française » et les médailles ou les primes pour les beaux bateaux, faudrait plus nous prendre pour des couillons !!!
Le bateau est loin d’être terminé (118, 120) mais nous ne résistons pas, une fois de plus, à constater qu’il a bien l’air d’un bateau et à vrai dire d’un caboteur ! Suivirent quelques opérations de cosmétique. Pour s’amarrer correctement, un navire a besoin de bittes d’amarrage. Celles que propose Soclaine sont minables. Nous allons concevoir notre propre modèle. De même, le mât qui, sur la cabine, sera destiné à supporter les feux règlementaires de navigation, l’antenne radio et le radar sera également de notre conception (125). La proue n’est toujours pas rehaussée ; quelques coups de « cutter » dans mon fameux CP 2mm et le tour est joué (126, 127, 128, 129, 133). Un zeste de chirurgie esthétique sera nécessaire pour faire disparaître plus tard les cicatrices de ce rehaussement. Vu de l’arrière avec les chandeliers de la future rambarde (142), le caboteur ressemble toujours un peu plus à un caboteur, donc nous poursuivons.
Faire, défaire, refaire, c’est le lot des bateaux à réparer, à transformer et c’est aussi celui du bateau Soclaine (je n’ai pas dit « des bateaux »…). La notice d’assemblage n’a pas donné de grandes précisions sur la question de savoir quand il fallait assurer quoi au niveau de l’axe du safran, de son tube, de sa fixation, de son étanchéité. En retournant la coque, ces questions nous préoccupent et nous décidons de diverses mesures (143). Les surfaces de collages futurs se présentent mal. Idem pour les questions d’étanchéité. Sans hésitation, nous saisissons notre Kalachnikov, en l’occurrence le vibreur « FEIN » (144) qui peut être équipé d’un grand nombre d’accessoires et qui m’a rendu grand service dans la construction du « Vadima », mon grand voilier de croisière. L’outil, équipé d’un fin « peigne-sciant » dégage la matière jugée en trop. Une plaque de mon propre CP de qualité va agrandir et améliorer la solidité du tableau arrière de la coque (145). Pour assurer un bon guidage de l’axe du safran et contribuer à l’étanchéité future de cette zone, nous décidons de placer à cet endroit une plaque d’aluminium (146, 152). Désormais on peut terminer le collage des plaques du fond de la coque (155, 156). Entretemps nous avons poursuivi divers petits travaux au niveau de la cabine (158) : bastingage, hublots, cheminée. Et pour la 2e et dernière fois (!) s’imposait la nécessité de doter le navire d’un solide tableau arrière (en CP de bonne qualité, est-il encore besoin de le préciser ?). Notre objet ressemble-t-il toujours à un caboteur ? L’image (175) traduit bien davantage notre enthousiasme que notre souci de ressemblance. Oui, le caboteur est en passe de devenir un beau navire, original et unique dans ses détails. Un développement en cours c’est celui de la conception du mât qui, placé sur le toit de la cabine, supportera les feux de position, l’antenne radio et le radar (166, 168, 172). Ce mât quelque-peu massif servira aux mises au point et une version plus fine sera finalement construite selon ce modèle.
Ne reste plus qu’à résoudre le montage du safran (178, 180, 182, 183). Première opération, défonçage d’une partie en bois de la quille, à remplacer par un profilé rectangulaire d’aluminium qui sera protégé latéralement par deux flasques en CP 2mm de bonne qualité. L’axe du safran devant se loger dans ce profilé métallique. L’idée était jugée bonne et facile à réaliser telle qu’en témoigne l’image 183 mais c’est lors du repas de fin d’année 2018 du club que tout bascula ! Notre ami Gé-Gé y présentait son superbe vapeur « Le Point d’Interrogation » et une remarque retint mon attention : « Il faut pouvoir démonter le safran » ! Pour son entretien bien évidemment et pour son éventuel remplacement en cas d’accident. Or moi j’avais conçu un système fixe ! Nous en sommes-là à ce jour. Dans notre futur reportage final, nous reviendrons à la situation décrite par l’image 180 : une pièce démontable de bois dur fixée par trois vis remplacera l’actuel montage.
A l’avant du caboteur est un mât fixe au pied duquel s’articule un mât de charge (184). Comme cet ensemble comporte quelques petites bagues métalliques de fixation et que je ne suis pas outillé pour travailler le métal, j’ai approché Gé-Gé pour qu’il me donne un petit coup de main… Si les deux fois G (ou Gé-Gé) désignent notre ami Gérald Hautier, pour moi les deux fois G s’appliquent non seulement à notre ami pour le nommer mais aussi pour le qualifier : Gé-Gé comme Généreux et Génial constructeur. En effet ma demande pour quelques petites bagues de fixation des mâts ou de bouclettes pour tenir des réas minuscules s’est finalement traduite par la fourniture, clés en mains, d’un attirail absolument complet à installer sur le gaillard d’avant. Ce magnifique ensemble conférera une touche finale impeccable à ce caboteur. Nous en reparlerons !
Actuellement nous nous trouvons dans un moment de vérité. La suite logique des opérations consistera à mettre en place le tube d’étambot puisque nous avons en mains tous les composants nécessaires : moteur, variateur, cardan, tube d’étambot, hélice et, tout à l’arrière : safran, tube et axe et concept de quille démontable. Le tout devant être parfaitement étanche et solidement installé. Mais la grande difficulté, lorsqu’on doit intervenir dans une coque construite, c’est d’effectuer des mesures ou de prendre l’empreinte d’une pièce semi-cachée ou celle d’un emplacement exigu. Après quelques jours d’essais infructueux résumés par ces deux images (196, 197), le support du moteur a été mis au point (194) alors que la base du futur support de l’accu était esquissée. Le lendemain, celui-ci était terminé (202, 201). Construit essentiellement en CP 2mm de qualité (j’insiste toujours sur la qualité sinon c’est de la m…) cette structure légère se révèle souple et parfaitement adaptable aux formes « informes » d’un bloc d’accus enrobé d’une feuille de plastic souple. Sur la gauche de l’objet, une petite plaque verticale enserre littéralement l’accu dans son logement mais ses deux côtés restent libres et réservés aux passages des câbles. Le prochain reportage expliquera comment ces supports de moteur et d’accu auront été fixés dans le fond de la cale du caboteur.
Inutile de préciser qu’aujourd’hui, nous avons une bonne idée de la quarantaine ou de la cinquantaine des travaux qui restent à réaliser pour que le petit caboteur « selon Soclaine » finisse par devenir un véritable modèle navigable revu par les soussignés, c.à.d. étanche et radio-commandé ! Pourquoi disons-nous étanche ? Parce que, dans les instructions de montage selon Soclaine, il est dit que, « pour assurer la bonne étanchéité du modèle, il faut déposer abondamment la colle sur les parties à assembler ». Encore conviendrait-il de préciser qu’il faudrait éviter d’utiliser de la colle soluble à l’eau …
(La suite à un prochain numéro, en 2020 si tout se déroule comme prévu).
Roland et Mathys Besancet
Date de dernière mise à jour : 20/10/2019
Commentaires
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- 1. Herren Maurice Le 20/10/2019
Salut Roland et Mattys,
Un grand bravo pour cette magnifique maquette si bien réalisée, avec beaucoup de maîtrise et de la voir bientôt naviguer. Et que dire du plaisir qu'aura le GP quand il verra son petit-fils la piloter !
Bravo a Mattys, je lui souhaite énormément de plaisir dans cette construction et dans les futures. Merci a vous deux pour le partage.
Bien amicalement Maurice -
- 2. ghautier Le 20/10/2019
Merci à Roland pour ce reportage qui confirme ce que j'ai toujours dit et affirmé : Les kits Soclaine ne sont pas du tout fait pour des débutants ou alors juste pour les dégouter du modélisme. J'ai donné et je sais donc de quoi je parle !!.
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